samedi 29 novembre 2008

L'avenir du luxe selon Uché Okonkwo en 2009

33O millions de bouteilles ! C’est le nombre de bouteilles de Champagne vendues en 2007, la plus grosse vente jamais connue depuis la création du Champagne en France vers 1668. Ainsi, l’année dernière fut baptisée l’année du Champagne dans le secteur du luxe. Un an plus tard, à l’approche de la fin de l’année 2008, il semble que l’histoire ne se répétera pas dans le monde des vins haut de gamme, ni même dans les autres secteurs du luxe tels que la mode et les accessoires, la maroquinerie, les parfums et les cosmétiques et même, selon toute apparence, les secteurs réputés intouchables, ceux de la joaillerie et de l’horlogerie.

Avec l’économie américaine en récession et avec ses impacts sur le reste du monde, la question de la conséquence de la crise financière sur le marché du luxe est posée partout, des salles des conférences, aux magasins et aux hôtels, aux entreprises et même chez les clients. Dans le secteur de la mode et des accessoires, la gamme de produits est en train d’être réévaluée et modifiée pendant que, dans la distribution, les projets de développement du réseau des magasins sont réexaminés et le processus de commercialisation amélioré pour optimiser les ventes. Dans la catégorie des vins et spiritueux haut de gamme, les budgets et dépenses en publicités sont en train de baisser alors qu’en joaillerie et en horlogerie, la réponse à la question du changement dans les comportements des clients des marchés émergeants reste sans réponse en ces temps incertains. Dans le secteur des hôtels de luxe, l’occupation des suites reste la même mais, globalement, il y a un léger ralentissement au niveau des séjours et des diners, comme si les clients trouvaient soudainement leurs foyers plus attrayant au divertissement et à la relaxation. Bien que les réponses que nous avons reçues varient lorsque nous avons demandé aux clients du luxe, dans le cadre du débat actuel sur Luxe-mag.com section « opinion », si leurs dépenses dans ce secteur avaient changées, cela indique une chose – un produit à un prix élevé reste attirant alors qu’un produit à bas prix est synonyme de déclin des ventes.

De plus, les performances attendues sur le marché européen, japonais, asiatique et avec les marchés du luxe émergeant de Chine, d’Inde, de Russie, du Brésil et du Moyen-Orient ont été un challenge à surveiller et à prédire, car les multiples facteurs macro-environnementaux affectent actuellement ces régions à différents niveaux. Des facteurs comme le prix du pétrole, les performances de la bourse, l’inflation, les taux d’importations et d’exportations et les coûts des voyages contribuent tous à un nouveau déséquilibre conjoncturel et à une incertitude sur la nouvelle direction de l’industrie du luxe. Des analystes optimistes ont indiqués que les marques de luxes tels que Hermés, Louis Vuitton et Gucci vont sortir indemne car ils ont eu la présence d’esprit de décentraliser leur dépendance à des marchés spécifiques, tout en maintenant un plan de croissance international au niveau des ventes et tout en diversifiant leur portefeuille de produits. D’autres ont affirmés qu’avec le déclin manifeste des ventes aux USA et les signes précoces du ralentissement des voyages et des ventes dont nous avons été témoin en Europe et au Japon, deux marchés matures décisifs, le secteur du luxe n’aura pas une année 2009 tellement « rose ». Les prédictions réalisées sur le résultat attendu pour 2009 indiquent une diminution de 7% dans le secteur (Bain & Company), pendant que d’autres indiquent une sombre baisse de 7,4% de l’indice boursier du luxe comparé à 2007 (TAG). Un exemple concret dans l’actuel perspective des ventes de luxe est l’ouverture récente du centre commercial de Westfield à Sherpard’s Bush de Londres, qui est le plus grand centre commercial d’Europe. Avec une espace des ventes de six millions de mètres carrés et avec la présence de magasins tel que Louis Vuitton, Tag Heuer, Dior, Versace, Tiffany’s et Armani, le centre commercial, qui a ouvert le 30 octobre, a attiré de nombreux spectateurs, même si ils n’ont pas forcement acheter des produits de luxe.

Les marchés émergents, qui ont été considérés comme des secteurs qui pourraient assurés des revenus financiers élevés pendant la prochaine année, commence aussi à montrer des premiers signes de frémissements. Les taux d’importations et d’exportations en Chine sont bas et sont les résultats d’une demande moins forte, pour la première fois en six ans, pendant qu’en Russie, le GDP, au deuxième semestre de l’année 2008, baisse de 1% comparativement à l’année précédente. En Inde, même le marché grimpant des jets privés n’est pas assuré d’être épargné car le taux d’inflation continu d’augmenter. Le Japon, longtemps considéré comme le paradis de la consommation de luxe a aussi montré des signes de ralentissement et se rapproche de sa première récession. Le rendement économique a baissé de 2,4% au deuxième trimestre de 2008. Au milieu de toute cette incertitude, nous pouvons être d’accord pour dire le fameux slogan, « unsinkable luxury » qui est maintenant remis en question.

Mais quel avenir pour le secteur du luxe ?

Les analystes de Luxe Corp sont optimistes et disent que le marché du luxe est assez résistant pour surmonter un ralentissement économique à long-terme. Cela sera principalement mené par le marché européen du luxe qui reste le principal dans ce domaine et qui a une importante aide de la Russie et des autres pays émergeant de l’est tel que la Pologne, la Roumanie, la République Tchèque et la Bulgarie. La dépense grandissante sur les articles de luxe dans le marché international du luxe, qui, en ce moment, bénéficie des stars montantes de Chine, d’Inde, du Moyen Orient, du Mexique et bien sur de la Russie qui contribuera aussi à la viabilité à long-terme du marché du luxe.

Cependant, à court-terme, la réalité de la crise financière américaine et de son impact sur le reste du monde devrait conduire à une baisse des ventes, en particulier sur les catégories de produits qui ne sont pas considérées comme des « investissements » par les consommateurs, des produits tels que les parfums, les cosmétiques et les vêtements. Les autres catégories comme les costumes masculins qui peuvent être directement liées au marché financier (pensent les banquiers), seront aussi affecté, bien que le prêt à porter pour hommes ne verra pas une forte baisse des ventes à long-terme. Ce ralentissement des ventes devrait être sentit plus intensément aux Etats-Unis et au Canada plutôt que dans d’autres marchés du luxe. Il y aura cependant un impact indirect sur les autres performances des marchés à court-terme, car les clients du luxe dans les différents marchés du monde envisagent un possible ralentissement économique.
Nous n’avons cependant pas tendance à croire que l’impact de la crise va être spécifique aux maisons de luxe particulières. Nous somme formel en disant que le degré d’impact sur la performance d’une marque variera suivant les mesures que la marque prendra et qui garantira une bonne stratégie dans la situation actuelle. Les marques qui ont diversifié leur portefeuille de produits pour atteindre une balance entre les produits chers et accessibles seront moins exposées à un déclin éventuel des ventes. La même chose peut être appliquée pour l’équilibre des réseaux de magasins dans les différents marchés selon leur rythme de croissance. Le facteur de distribution peut aussi être appliqué à internet, qui devient un moyen de vente de plus en plus important pour les produits de luxe.

Les marques de luxe qui résisteront pendant cette période de ralentissement seront celles qui auront des stratégies en matière de marketing, de vente et de vente en ligne, de relation avec le consommateur, d’expansion globale et de management des produits et services. C’est cependant plus facile de dire que d’agir, en particulier parce que la réaction naturelle lors d’une récession est de casser le budget sur les initiatives de marketing, et que, pour moi, la réaction devrait être l’inverse. Les temps incertains sont les périodes où les marques ont besoin d’investir en créant de vraies relations entre les clients existant qui, à leur tour, pourront en attirer d’autres.

Luxe Corp propose les huit conseils suivant qui contribueront à créer un modèle qui permettra au luxe d’aller de l’avant à partir de 2009.

1. Management des produits : Au cours des dernières années, plusieurs marques de luxe ont diversifié leurs portefeuilles de produits en proposant une large gamme de produits grands publics comme les parfums, puis une gamme moyenne d’articles comme le prêt-à-porter et les produits à prix élevés comme la joaillerie. Effectivement, la gestion de ce portefeuille est essentielle pour optimiser les ventes et positionner la marque idéalement. Seulement les marques qui auront concentré leur énergie et leurs ressources à développer leurs portefeuilles de produits auront une durabilité réelle à long terme. Les quelques marques de luxe qui ont choisi d’adapter leur style de produit selon les goûts locaux en sacrifiant leur propre image auront des difficultés. En ces temps de récessions, les produits abordables ne protègent plus les marques mais les exposent ! Exemple typique : plus de six mille (6 000) personnes avaient mis une option sur l’achat du nouveau coupé-cabriolet de Ferrari qui valait 180 000 €, avant même que la marque est ouvert officiellement les ventes.

2. Expérience dans les services : Bien que les clients aisés ne changeront probablement pas leurs habitudes d’achats à long-terme, la situation économique va éveiller la conscience des gens, qu’ils soient riche ou pas. Les clients du luxe rechercheront des expériences d’exceptions, que se soit dans la vente ou à travers la conciergerie, les courses personnelles, ou par les services et produits personnalisés. Les marques qui seront capables d’offrir un service élevé aux clients seront plus appréciées. Gucci fournit un service de conciergerie à Dubai, cela c’est avéré être un lien direct entre la marque et ses clients.

3. Réseau de vente : Avec le taux de demande d’articles de luxe en augmentation sur le marché international, les principales entreprises de luxe ont entreprit, ces cinq dernières années, une expansion internationale déterminée pour rechercher des clients issus des marchés émergents. Il est important de trouver un bon équilibre entre l’ouverture des magasins et l’évolution du niveau de besoin de chaque marché. Coach, qui a plus de cent magasins au Japon n’a pas besoin d’avoir le même nombre de magasins en Russie, vu que la taille et la dynamique du marché sont différentes.

4. Recherche du consommateur : En temps de crise, il est essentiel d’être en phase avec les valeurs des clients, l’évolution des besoins et le changement des mentalités. Comprendre l’évolution, les cycles, les tendances, les mentalités et les attentes des clients et du marché de la consommation pendant la récession est la clef pour obtenir le meilleur avantage compétitif. Plutôt que de casser les budgets pour obtenir des couts avantageux, une étude de marché sur le consommateur peut être réalisée à travers des systèmes d’opérations et avec des économies d’échelles. Bien que les clients aisés consommeront des articles de luxe pendant la récession comme il le font en ce moment avec le marché d’art, il est essentiel de comprendre l’impact à long-terme que la récession aura sur eux. Un exemple concret est que, bien que plusieurs marques de luxe aient été d’accord sur le fait que le marché de l’art va être affecté par la récession, il se trouve qu’il est actuellement florissant, et que les maisons d’enchères font affaires, à l’exemple de Christie’s qui a dépassé ses estimations pour l’impressionnisme avec des œuvres signées par des grands noms tels que Rodin, Monet et Giacometti.

5. Internet : Internet restera un réseau primordial de communications, de vente et de renforcement pour les marques de luxe. Dans la situation actuelle, internet va jouer un rôle très important au niveau des maisons de luxe et des clients. Au niveau des maisons, internet sera important pour faire des économies et pour les clients, ça donnerai un moyen de trouver une vraie valeur. C’est spécialement vrai dans le climat actuel où une dépense excessive est souvent considérée comme déplacée et pas à la mode, donc les clients aisés opteront pour des achats « online » en toute intimité. Un autre groupe de consommateurs de luxe, celui des classes moyennes, va aussi utiliser internet comme « terrain de chasse » pour obtenir des produits de luxe à prix discount. Il est essentiel pour les marques de luxe d’optimiser leur présence en ligne, pas seulement pour les ventes mais aussi pour les communications et pour l’image de la marque. Viktor & Rolf ont présenté le premier défilé uniquement sur internet pour leur collection p/é 2009, qui a été mis en ligne pendant la semaine de la mode de Paris. Cela a donc montré que internet est un outil important pour l’influence d’une marque. La création d’un monde virtuel autour de la collection de Christian Lacroix pour La Redoute a aussi considérablement contribué au succès de la gamme.

6. Créativité et innovation : Avecl’actuel ralentissement économique, les produits de luxe ne seront plus jugés seulement par leur beauté et par leur marque, mais aussi par leur degré de rareté et par leur valeur rajoutée. Pour garantir une offre élevée, les marques de luxe devront créer 'un univers' exceptionnel autour de chaque produit et de chaque service étant en harmonie avec l’image de marque. Cela peut être réalisé à l’aide de personnalisation, de collaboration ou bien d’évènements privés ; les clients cherchent à être séduits. Le principe de beau et nouveau produit ne sera donc plus décisif pour une vente importante.

7. Promesse de la marque : Maintenant plus que jamais, les marques de luxe devraient agir comme des marques étant capables de surmonter un ralentissement pendant la prochaine année. En mettant l’accent sur une identité claire et précise, une marque va garantir des bons services et une bonne communication. Cela reste vrai pour l’identité de chaque marque sans compromettre aucun aspect de la promesse de base, et c’est essentiel pour assurer la réussite dans l’évaluation des choix des clients. Plusieurs marques américaines et distributeurs tels que Coach et Saks Fifth Avenue ont ouvert les ‘outlet discount stores’ pour vendre des produits haut de gamme aux prix bas. Coach, qui a 297 magasins et aussi 102 ‘outlet discount stores’, voit ses ventes baisser dans ses magasins principaux alors qu’elles augmentent dans les usines discount. Une leçon sur la gestion d’image de marque.

8. Collaboration et co-branding : Il n’y a pas meilleur moment, pendant une période de ralentissement des ventes, pour prendre des initiatives, pour créer des collections exceptionnelles et pour des collaborations. Les vrais consommateurs de luxe aujourd’hui cherchent à être séduits.

La crise financière prendra fin en Europe et dans la plupart des autres pays, à l’exception des Etats-Unis, alors que les résultats du deuxième trimestre de 2009 sont annoncés. Aux Etats-Unis, où le taux de chômage est actuellement à 6.1 % et où la récession a été prédite pour durer jusqu'à 2 ou 3 ans avant que l'économie se rétablisse, la perte sera plus lourde. Mais quelles vont en être les conséquences sur la mentalité du consommateur ? C’est là où est toute la question. Dans le long terme, les marques de luxe devront travailler dur pour obtenir une crédibilité, les consommateurs devront être plus critiques pour évaluer ce que valent vraiment les marques de luxe. Même sur les marchés émergents.

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